La ville ne tient plus en places
La concentration du capital à Paris, Londres ou New York réduit les centres-villes à des galeries commerciales géantes et à des open-spaces hyperconnectés, devenus trop chers et donc inhabitables pour les classes populaires comme pour des populations en voie de déclassement toujours plus nombreuses. Elles se trouvent reléguées dans des périphéries de plus en plus lointaines à mesure que progresse la gentrification.
Richard Sennett, auteur de Bâtir et habiter. Pour une éthique de la ville
Cette ville fragmentée socialement et spatialement a ses emblèmes, comme le Googleplex de New York. Installé dans les anciens locaux des autorités portuaires de la ville, il abrite les employés du célèbre moteur de recherche, qui viennent chaque jour y travailler. Travailler, mais pas seulement, car chacun peut «donner son linge à laver, voir un médecin, fréquenter la salle de sport, rattraper son sommeil s’il a travaillé tard, regarder un film pour se détendre», décrit Richard Sennett dans son livre. Réservé aux salariés, cet environnement all inclusive est inaccessible aux habitants du quartier populaire de West Village dans lequel il est implanté. Le Googleplex s’oppose ainsi à tout ce qui permet à la ville d’être ouverte et démocratique : c’est une bulle hermétique qui sépare ses employés aisés des autres classes sociales, tout en devenant un redoutable espace de contrôle de la vie quotidienne de celles et ceux qui s’y trouvent, sous couvert de leur faciliter la vie.